Les enjeux de souveraineté liés à la cybersécurité des entreprises
Points clés
- La souveraineté numérique est devenue un enjeu stratégique pour les entreprises et les États face à la multiplication des cybermenaces
- Elle implique de maîtriser ses données, ses infrastructures et ses technologies pour garder son autonomie de décision et d'action dans le cyberespace
- Le cloud computing cristallise les tensions, avec une domination des acteurs américains qui inquiète sur la confidentialité et la sécurité des données
- Développer un écosystème numérique souverain est une priorité, en investissant dans la R&D, la formation et les solutions de confiance
- Une approche européenne concertée est indispensable pour peser face aux géants mondiaux et garantir notre indépendance technologique
Introduction
A l'heure de la transformation numérique, la question de la souveraineté est plus que jamais d'actualité. Avec la multiplication des cyberattaques et l'explosion des données, maîtriser son système d'information est devenu un enjeu stratégique, tant pour la compétitivité des entreprises que pour l'autonomie des États.
Car derrière les promesses du tout connecté se cachent de nouvelles vulnérabilités et dépendances. Imaginez que vos données les plus sensibles soient localisées hors de nos frontières, potentiellement accessibles à des puissances étrangères. Ou que vos outils numériques critiques soient contrôlés par une poignée d'acteurs extra-européens. C'est toute votre capacité de décision et d'action qui serait menacée !
Face à ce constat, la souveraineté numérique s'impose comme une ardente obligation. Mais comment la définir concrètement ? Quels en sont les enjeux pour les entreprises ? Et surtout, comment la construire dans un monde globalisé ? Nous allons tenter de répondre à ces questions dans cet article. Prêts à reprendre le contrôle sur votre destin numérique ? C'est parti !
La souveraineté numérique, de quoi parle-t-on ?
Commençons par clarifier ce concept devenu incontournable mais parfois mal compris. La souveraineté numérique, c'est la capacité d'un État ou d'une organisation à maîtriser son destin dans le cyberespace. Concrètement, cela implique de :
- Contrôler ses données stratégiques, savoir où elles sont localisées et qui y a accès
- Sécuriser ses infrastructures critiques pour assurer la continuité de ses activités
- Maîtriser les technologies clés pour garder son autonomie et sa liberté de choix
- Disposer des compétences pour concevoir et opérer ses propres solutions
- Défendre ses intérêts et valeurs dans la gouvernance mondiale du numérique
Bref, être souverain dans le cyberespace, c'est être aux commandes de ses actifs numériques. Une exigence qui vaut aussi bien pour les États, garants de notre sécurité et de nos libertés fondamentales, que pour les entreprises, dont la compétitivité et la réputation en dépendent.
Car avec la numérisation de l'économie, les données et les systèmes d'information sont devenus le carburant et le système nerveux de nos organisations. Imaginez les conséquences d'une fuite massive de données clients, d'une interruption prolongée de vos services ou d'un rançongiciel qui paralyserait votre outil de production. Votre survie serait en jeu !
Le cloud, talon d'Achille de notre souveraineté
S'il est un domaine où les enjeux de souveraineté sont exacerbés, c'est bien celui du cloud computing. En externalisant le stockage et le traitement de leurs données dans des data centers tiers, accessibles à distance, les entreprises ont gagné en agilité et en performance. Mais elles ont aussi perdu en contrôle et en indépendance.
Car le marché du cloud est ultra-dominé par une poignée de géants américains : Amazon Web Services, Microsoft Azure, Google Cloud... À eux trois, ils concentrent plus de 60% des parts de marché mondiales ! Une situation hégémonique qui soulève de nombreuses inquiétudes :
- Quid de la confidentialité des données, soumises au Cloud Act qui permet aux autorités américaines d'y accéder sans passer par la justice européenne ?
- Quid de la sécurité, alors que ces acteurs sont des cibles de choix pour les cyberattaques et l'espionnage ?
- Quid de la réversibilité, en cas de changement de prestataire ou de règles du jeu ?
- Quid de la pérennité de l'écosystème européen du numérique face à une telle domination ?
Des craintes avivées par l'invalidation en juillet 2020 du Privacy Shield, cet accord qui encadrait les transferts de données entre l'UE et les États-Unis. Depuis, c'est le flou juridique pour les entreprises qui utilisent des services cloud d'outre-Atlantique. Beaucoup s'interrogent sur la conformité au RGPD et cherchent des alternatives souveraines.
Car le risque est réel de voir nos données les plus stratégiques partir dans une sorte de "data-colonialisme" où nous perdrions toute maîtrise. Déjà, certains secteurs sensibles comme la défense ou la santé s'interdisent de recourir à des clouds extra-européens. Mais pour beaucoup, difficile de se passer de ces services devenus essentiels à leur transformation numérique.
Vers un cloud de confiance made in Europe
Face à ce défi, la réponse ne peut être qu'européenne. Aucun État membre n'a la taille critique pour développer seul une offre cloud souveraine capable de rivaliser avec les géants américains ou chinois. C'est tout l'enjeu du projet GAIA-X, lancé en 2019 à l'initiative de la France et de l'Allemagne.
L'idée : fédérer les acteurs européens du cloud et du edge computing autour d'une architecture commune, interopérable et sécurisée, respectueuse de nos valeurs et de notre droit. Avec à la clé, la promesse d'un cloud de confiance, garant de la localisation des données en Europe et de leur protection contre les accès non autorisés.
Un projet ambitieux, qui rassemble déjà plus de 300 organisations de 18 pays, dont de grands noms comme EDF, Orange, Siemens ou Bosch. Mais aussi des pépites technologiques comme OVHcloud, Scaleway ou 3DS Outscale, fer de lance d'une nouvelle génération de champions européens du cloud. L'enjeu est de leur donner les moyens de se développer, par la commande publique, la régulation et l'investissement.
Car pour réussir, GAIA-X devra s'appuyer sur un écosystème dynamique d'acteurs innovants, capables de proposer des solutions souveraines compétitives. C'est tout le sens de la stratégie cloud de l'État français, qui mobilise 1,8 milliard d'euros pour "accélérer l'usage du cloud au service de la transformation numérique de l'économie".
Une souveraineté à construire à tous les étages
Mais le cloud n'est que la partie émergée de l'iceberg. Pour être pleinement souverain dans le cyberespace, il faut maîtriser toutes les couches du numérique :
- Les infrastructures télécoms, avec la 5G et la fibre, pour garantir l'autonomie de nos réseaux
- Les composants électroniques, avec les semi-conducteurs, pour sécuriser nos approvisionnements
- Les systèmes d'exploitation et logiciels, avec des solutions open source européennes
- Les données, avec des plateformes de partage sécurisées pour favoriser leur circulation
- Les compétences, avec des formations d'excellence pour disposer des talents nécessaires
Autant de briques essentielles à notre souveraineté numérique, qui appellent une action coordonnée des pouvoirs publics et des acteurs privés. L'enjeu est de construire une troisième voie européenne, entre le modèle américain tout-marché et le modèle chinois tout-État. Une voie qui concilie performance économique et protection de nos intérêts stratégiques.
C'est tout le sens du plan d'investissement France 2030, qui mobilise 6 milliards d'euros pour "faire émerger les futurs champions technologiques de demain". Avec des priorités claires : la cybersécurité, le quantique, l'intelligence artificielle, le cloud, les données... Autant de technologies clés pour notre souveraineté et notre compétitivité.
RGPD et sécurité des données personnelles : ce qu'il faut savoir
Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) est une législation essentielle visant à protéger les données personnelles des individus au sein de l'Union européenne. Il établit des règles strictes concernant la collecte, le traitement et la conservation des informations personnelles. Les entreprises doivent se conformer aux exigences du RGPD pour garantir la confidentialité et la sécurité des données de leurs clients. Les violations du RGPD peuvent entraîner des amendes considérables, soulignant l'importance de la conformité. Comprendre les principes fondamentaux du RGPD est crucial pour toute organisation manipulant des données personnelles sensibles.
Cybersécurité : quelles obligations légales pour les entreprises ?
Les entreprises sont tenues de respecter des obligations légales strictes en matière de cybersécurité pour protéger les données sensibles de leurs clients. Ces obligations incluent la mise en place de mesures de sécurité robustes pour prévenir les cyberattaques et les violations de données. Les entreprises doivent également se conformer aux lois et réglementations en vigueur concernant la protection des informations personnelles et la notification des failles de sécurité. La sensibilisation des employés aux bonnes pratiques de sécurité informatique est essentielle pour renforcer la posture de cybersécurité d'une entreprise. En cas de non-respect de ces obligations, les entreprises encourent des sanctions sévères et des dommages à leur réputation.
Faut-il réduire le chiffrement pour combattre le crime en ligne ?
La question de savoir s'il faut réduire le chiffrement pour lutter contre le crime en ligne suscite des débats passionnés. D'un côté, certains estiment que l'affaiblissement du chiffrement pourrait faciliter le travail des forces de l'ordre. De l'autre, les défenseurs de la vie privée soulignent que cela pourrait exposer les données sensibles des utilisateurs. En outre, une telle mesure pourrait créer un précédent dangereux pour la surveillance étatique. Finalement, il est crucial de trouver un équilibre entre la sécurité publique et la protection des droits individuels.
Conclusion
Comme nous l'avons vu, la souveraineté numérique est devenue un impératif stratégique pour nos entreprises et nos États. Face à l'explosion des cybermenaces et à la domination des géants du web, il y a urgence à reprendre le contrôle sur nos actifs numériques les plus précieux.
Cela passe par une prise de conscience collective des enjeux, une volonté politique au plus haut niveau et des investissements massifs dans les technologies et les compétences. Mais aussi par une coopération européenne renforcée, seule à même de nous donner la masse critique nécessaire dans cette bataille mondiale des données.
Alors dirigeants, ne restez pas spectateurs de cette transformation ! Soyez acteurs de votre souveraineté numérique, en repensant votre stratégie cloud, en sécurisant vos données, en développant vos propres solutions. Les opportunités sont immenses pour ceux qui sauront se saisir de ce défi.
Et n'oubliez pas, la souveraineté n'est pas un repli sur soi. C'est au contraire une condition de notre rayonnement et de notre leadership dans le monde de demain. Un monde où le numérique sera le nerf de la guerre économique et géopolitique. Alors en 2024, faites de la souveraineté numérique votre priorité stratégique. L'avenir de votre entreprise et de notre modèle européen en dépend !